ÉCRIRE POUR MIEUX VIVRE

Publication: août 2021
Médias : magazine Entre Nous
Illustration : Maja Radinović

De nombreuses études l’ont démontré : refouler ses émotions
nuit à la santé. Écrire pensées et ressentis permet de relâcher
certaines tensions émotionnelles et de s’en libérer.
Explications.

L’écriture,  c’est  un  art. Mais  c’est  aussi  la  mise  en  évidence  des  maux  par  les  mots.  Pour  l’auteur Bernard Werber, tout écrivain a une frustration, une douleur à panser. « On souffre  dans sa vie donc on a besoin d’en parler par écrit pour prendre le monde à témoin », dévoile t-il  dans  ses  Conseils  aux  écrivains  en  herbe.  Poser  nos  maux  sur  le  papier,  c’est  faire  un  premier pas vers la résilience. « Écrire permet de mettre en lumière toute problématique, de  manière  consciente  ou  inconsciente.  Tant  que  la  création  prend  une  signification  soit  immédiate soit ultérieure, elle peut soigner car elle amène à une réflexion et à une mise à  distance de soi », explique Jessika Contenet, artthérapeute dont les ateliers passent souvent  par l’écriture. 

S’autoriser à se lancer 

Nul  besoin  d’être  écrivain  ni  d’avoir  des  connaissances  pointues  en  littérature  ou  en  grammaire pour que des bienfaits se manifestent. « Une lettre ou un signe ayant un sens pour  la  personne  qui  le  trace  est  considéré  comme  écriture  »,  poursuit  la  thérapeute.  Mais  comment  l’acte  d’écrire  peut-il  avoir  un  effet  positif  sur  notre  santé  ?  En  1986,  James  Pennebaker,  professeur  de  psychologie  à  l’université  du  Texas,  publie  les  résultats  d’une  expérimentation  qu’il  mène  pour  le  Journal  of  Abnormal  Psychology.  Depuis  le  début  des  années 1980, l’homme a mis au point une méthode d’exploration de soi par l’écriture. Pour cette  étude,  il  avait  réparti  ses  étudiants  en  deux  groupes.  Les  élèves  du  premier  groupe  devaient  écrire  chaque  jour  pendant  20  minutes  sur  les  pires  événements  de  leur  vie  de  manière  la  plus  sincère,  profonde  et  décomplexée  possible,  en  décrivant  les  pensées,  les  émotions  qui  les  avaient  traversés  à  l’époque  où  ils  les  avaient  vécus, mais  aussi  ce  qu’ils  éprouvaient toujours dans le présent quand ils y pensaient. Les étudiants du second groupe  devaient, quant à eux, écrire sur des événements banals de leur vie. Au bout de six semaines,  tous ont été soumis à des tests sanguins. Les étudiants du premier groupe présentaient un  système immunitaire renforcé, leur pression artérielle avait baissé et ils étaient moins stressés  et moins anxieux. 

Libérer ses émotions, les observer et les accepter 

Ruptures,  TOC,  attaques  de  panique,  addictions,  troubles  du  comportement  alimentaire,  anxiété, manque de confiance en soi, d’estime de soi, trauma ou encore deuil… pour Jessika  Contenet, l’écriture est  un  outil  précieux.  « Elle permet  de  se  distancier et  de  se  détacher  physiquement de la problématique qui nous pèse. En visualisant physiquement les maux, ils  perdent de leur toute-puissance car ils deviennent transformables et manipulables. Le mal est  alors un mot pragmatique dont l’impact émotionnel est diminué. » Pour elle, tous les troubles  psychiques peuvent être soignés par l’écriture. S’il n’est pas indispensable, l’accompagnement  d’un  ou  d’une  thérapeute  peut  s’avérer  précieux,  notamment  lorsque  des  souvenirs  douloureux  et  des  traumas  enfouis  depuis  des  années  remontent  à  la  surface.  Le  rôle  du  praticien est d’aider la personne à avancer avec ces nouvelles données. 

Pourquoi et comment se lancer ? 

L’écriture thérapeutique ne requiert aucun talent particulier. Vous pouvez vous lancer seule  ou au sein d’un atelier (à partir de 45 € la séance). La guérison ne passe pas par la qualité de  votre plume, mais par la sincérité de vos mots. Journal, poèmes, cahiers de gratitude, lettres  non envoyées puis brûlées, analyses de rêves… toutes les expressions écrites sont bonnes et  le choix de leur forme vous appartient. « Chaque fois que je vis une émotion forte, que ce soit  suite  à  un  échange  houleux  avec  quelqu’un  ou  parce  que  j’ai  assisté  à  une  scène  qui m’a  profondément remuée, je prends le temps d’écrire, confie une élève de l’atelier Aleph Écriture (centre de formation consacré à l’écriture, à Paris). Au lieu de ruminer cette émotion toute la  journée, je sors mon petit calepin et je raconte ce que j’ai vu et ressenti à ce moment-là. Je  me  concentre  sur  les  détails  et  j’essaie  d’être  le  plus  sincère  possible.  Écrire  me  permet  d’exprimer  les  émotions  qui  m’ont  traversée.  Ainsi,  j’évite  de  les  ressasser  pendant  des  semaines ou de les laisser enfouies sous d’autres couches d’émotions. » Si déverser librement  ce qui nous affecte s’avère capital, prendre le  temps de se relire l’est  tout autant : un bon  moyen de faire face à son état émotionnel pour ensuite s’en libérer.

De nombreuses études l’ont démontré : refouler ses émotions nuit à la santé. Écrire pensées et ressentis permet de relâcher certaines tensions émotionnelles et de s’en libérer. Explications.