CAPE TOWN, UNE VILLE À LA POINTE
Publication : janvier 2021
Média : magazine Saveurs
Illustration : Sacha Terroy
Photos : Valérie Lhomme
La plus dynamique des cités sud-africaines
affiche une extraordinaire créativité dans tous les domaines,
des musées contemporains aux tables expérimentales. Visite.
Sur la marina du Victoria & Alfred Waterfront, l’un des lieux les plus visités de la ville du Cap, les chants polyphoniques des artistes de rue, en rythme avec les sonorités joyeuses émanant des balafons (sortes de xylophones en bois), transforment une quelconque promenade sur le port en un moment suspendu. Bienvenue dans la « ville arc-en-ciel », comme on la surnomme. Un rayon de soleil né après une pluie battante. Jeune, dynamique et amatrice d’art contemporain, elle a été élue Capitale mondiale du design, en 2014. Une métropole cosmopolite et inspirée attirant autant les architectes de renommée internationale que de grandes maisons du monde de la gastronomie, Relais & Châteaux en tête. Pour les cuisiniers sud-africains, la deuxième plus grande ville du pays est une vitrine où il est bon de se faire voir.
Une ville pleine d’énergie
Faite de friches industrielles réhabilitées, de buildings surplombants l’Océan, de plages de sable blanc et de paysages montagneux, la ville du Cap séduit. Les touristes l’adorent, les créatifs aussi. Le soleil y brille quasiment toute l’année, sa scène culinaire bouillonne à coups d’influences plurielles, et dunes, océan, montagnes, désert et vignes s’articulent autour d’elle, avec une proximité déconcertante. Un claquement de doigts suffit à nous plonger dans des contrées aux faux airs de Louisiane, de Canada, d’Alaska ou de Nevada. Pour l’industrie de la publicité, c’est un peu l’Hollywood de l’Afrique : tous les ans, plus de cinq cents spots publicitaires y sont réalisés. Une ville branchée donc, un peu show off aussi. Attirant les chefs populaires, de James Gaag, jeune étoile montante, à Luke Dale-Roberts, qui a de nouveau confirmé sa place au classement des 50 Meilleurs Restaurants du monde, en 2020. Les rooftops avec une double vue à couper le souffle – l’une sur l’Océan, l’autre sur l’imposante Table Mountain – ne désemplissent pas. Quant aux restaurants expérimentaux, ils sont pris d’assaut, comme chez The Test Kitchen, une adresse tendance où la dégustation commence dans une quasi-pénombre avec une série de mises en bouche millimétrées, servies tour à tour dans une chope de bière, une boîte en métal ou sur un plat qui part en fumée. Même le quartier du Bo-Kaap, ancien fief des populations originaires d’Asie du Sud-Est, brille de mille feux avec ses façades roses, bleues ou vertes, toutes plus « instagrammables » les unes que les autres !
Une gastronomie inspirée
Lorsque le besoin de sobriété se manifeste, les habitants du Cap mettent les voiles jusqu’à la petite ville pittoresque de Stellenbosch ou jusqu’à celle de Franschhoek (« le coin des Français »). Là-bas, les demeures paisibles se noient dans un océan de vignes cultivées jadis par les huguenots, ces Français protestants ayant trouvé refuge sur ces terres particulièrement riches et propices à l’élaboration de grands crus. Certains chefs, comme Chris Erasmus (Foliage Restaurant), ancien disciple de René Redzepi au Noma, s’approvisionnent directement dans la Jonkershoek Nature Reserve, une immense forêt située dans les environs. Champignons, feuilles de fougère, baies… Ses assiettes sont brutes, organiques, et chaque aliment est un mot de liaison dans la lecture du plat. D’autres chefs, comme Bertus Basson (Eike), puisent au plus profond d’eux-mêmes pour exprimer leur africanité. Livrant une cuisine contemporaine ni totalement noire, ni complètement blanche. Métissée, sans aucun doute, où les koeksisters – beignets épicés saupoudrés de coco râpée, douceur que l’on trouve dans toutes les épiceries du Bo-Kaap – sont détournés en version salée, précédant un springbok fondant servi façon bobotie du Cap, un plat populaire à base de viande hachée, de sauce tomate et de raisins secs, mijoté puis gratiné. Le tout bien évidemment accompagné de vins de la région, l’Afrique du Sud n’ayant plus rien à prouver sur le marché viticole.
Hôtels
107 Dorpstraat Boutique Hotel
Boutique-hôtel cosy de 8 chambres situé en plein cœur de Stellenbosch. L’établissement possède un rooftop offrant un panorama à couper le souffle sur les montagnes alentour et y organise régulièrement concerts et apéritifs pour ses clients. Équipe sympathique et petit déjeuner simple mais efficace.
À partir de 165 € la nuit, petit déjeuner inclus.
T More Quarters Hotel
Superbe hôtel situé tout près de Kloof Street, une rue ponctuée d’une foule de restaurants, de boutiques artisanales et de bars branchés. Les 22 chambres, spacieuses et très confortables, possèdent un espace cuisine ainsi qu’un salon. Au petit déjeuner : smoothie fraise-banane, lait d’amande et chocolat, fruits frais, miel local, granola maison, viennoiseries ainsi que des œufs préparés minute… divin. Un coup de cœur.
À partir de 165 € la nuit, en basse saison. www.morequarters.co.za
The Silo Hotel
Sur le front de mer, attenant au musée Zeitz, cet hôtel érigé dans un ancien silo impose par sa structure cylindrique et ses immenses baies vitrées à facettes. Même si vous n’y logez pas, ne manquez pas de visiter ce lieu hors du commun et faites au moins un tour jusqu’au bar restaurant et sur le rooftop offrant une vue imprenable sur Table Mountain, ni son rooftop dominant la ville.
Restaurants
Foliage Restaurant
Bienvenue dans le restaurant d’un ancien de chez Noma, et ça se sent ! Dans cet espace au décor brut, presque rustique – sièges en cuir, poutres apparentes et cheminée d’époque –, on découvre une cuisine végétale créative, organique même, où le zéro-déchet est le maître-mot. Le beurre est infusé à la graisse de bœuf, les légumes du jardin sont servis avec une poudre de baies séchées et quelques pointes de mayonnaise au gingembre et à la citronnelle. Quant à l’expression potagère du moment, une déclinaison de fenouil, de chou-fleur et de céleri confit recouverts d’une béchamel aux amandes et agrumes, elle réveille des saveurs rarement sollicitées. Une expérience tout à la fois singulière, généreuse et gourmande.
Menus entre 18 € et 38 € (six services).
Eike by Bertus Basson
Restaurant du chef populaire Bertus Basson, qui officie au fond de la salle, devant les clients. Celui-ci livre une partition bistronomique faite d’une succession de petites bouchées évoquant des moments marquants de sa vie. Décor moderne, service pro, ambiance chic mais pas guindée et superbe carte des vins pour parfaire le tout. Un excellent rapport qualité-prix.
Menu dégustation : 52 €.
Bo-Kaap Cooking Tour
Zainie, l’une des dernières habitantes d’origine malaisienne du quartier de Bo-Kaap, petit à petit gagné par la gentrification, propose une formule complète pour plonger dans la culture malaisienne. La visite guidée du quartier, ponctuée d’anecdotes historiques et de dégustations, est suivie d’un cours de cuisine dans la maison de Zainie, animé par son fils et sa belle-fille, puis d’un repas. L’occasion de discuter avec des locaux.
The Bo-Kaap Cooking Tour Experience : de 3 à 5 h, 55 € par personne.
The Old Biscuit Mill
Ancienne fabrique de biscuits réhabilitée en un lieu de vie branché, terrain de jeu des artistes de rue. Ce grand bâtiment divisé en plusieurs espaces, intérieurs et extérieurs, réunit des restaurants, dont un gastronomique, des boutiques (vaisselle chinée, mode éthique, art, etc.), ainsi qu’un marché de petits créateurs locaux, de produits frais et de street food (les samedis uniquement) avec dj set au programme.
Fermé le dimanche.
La plus dynamique des cités sud-africaines affiche une extraordinaire
créativité dans tous les domaines, de l’art contemporain le plus audacieux à une cuisine expérimentale aussi surprenante que maîtrisée. Quant à la nature environnante, grandiose, elle participe, elle aussi, à l’émerveillement du visiteur.